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héroïsme et sa poésie ; on aurait dit que la poésie, quelle que fût la forme qu’elle prit en lui, était si profonde qu’il n’en avait plus la conscience. Il avait cela de La Fontaine… de La Fontaine dont il méprisait l’idéal, du haut du sien. C’était l’arbre qui laisse tomber ses fruits et qui ne sait pas que les fruits qui roulent à ses pieds sont tombés de sa tête. Un jour, en causant avec lui, je citai en passant le vers de la Mort de Socratc :

On profane les Dieux pour les voir de trop près !

Il fut frappé comme si le vers était de moi. Il ne le reconnaissait pas…

V

Tel il fut, ce grand poète mêlé de grand homme. Tel cet ignorant de lui-même et des autres, et qui.pour l’honneur de sa poésie, fut ce que j’ai appelé : « un poète sans littérature ». Quelles avaient été, en effet, son éducation et ses connaissances acquises d’écrivain ?… On ne sait pas bien. Avait-il lu complètement Rabelais et La Fontaine, si antipathiques à l’idéalité de son