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II

Car il l’a été et il l’est ! 11 est le Virgile de notre âge, et bien plus grand que Virgile encore, comme nous, modernes et sortis du Christianisme, nous sommes, en âme, bien plus que n’étaient les Romains. Lamartine est le Virgile de la civilisation chrétienne par la profondeur des sentiments, et c’est un Virgile d’une bien autre force poétique par les facultés. Virgile, le Lamartine de sous Auguste, n’avait qu’une flûte et qu’une trompette, la flûte des Bucoliques et la trompette des Épiques, dont il avait attendri et passionné les sons. Le génie de Virgile est, en effet, la femme du mâle génie d’Homère ; c’estl’Andromaque de cet Hector. Mais le génie de Lamartine n’est la femme du génie de personne. Comme Virgile, il a pu chanter :

Je suis né parmi les pasteurs !

mais il avait, avec la flûte de Virgile, la lyre du lyrique, que Virgile n’avait pas, et qui est le plus magnifique instrument que Dieu ait mis aux mains des poètes. Jamais le Lyrisme n’est monté plus haut dans des vers plus beaux, et qui eussentravi, en l’étonnant, Virgile