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Samson. Il était un lettré. Il vint à Paris, Paris lui passa la main sur la tête, lissa les derniers grains de son granit et lui donna le poli qu’il aime. On le vit, le Lakiste énervé du Léta, rimer des Ternaires pour la Revue des Deux-Mondes, et chanter les nombres de Pythagore, comme un élève de l’École Normale, en récréation et en gaieté ! IV

Ainsi le lettré, le bel esprit, l’homme d’école et d’imitation remplaça ce qu’il y avait de timidement poète, — mais de poète après tout, — dans le rougissant auteur de Marie, et le Breton se naturalisa Parisien. C’est ce que certains critiques appelleront peut-être, dans la langue devenue officielle qu’on jargonne aujourd’hui, la seconde époque de Brizeux : mais pour nous, hélas ! c’est la plus triste, la plus lamentable manière de se survivre à soi-même ! Encore une fois, à dater de là, Brizeux a cessé d’exister. Transporté loin de son buisson, dont il est l’étoile, est-ce que le ver luisant ne s’éteint pas ? … Le poète bucolique de Marie, devenant le poète lyrique de La Fleur d’or, de cette fleur qui veut être encore le genêt des landes abandonnées, mais qui ne l’est plus, Brizeux perdit le naturel de sa manière, et en le perdant il perdit tout, car il n’avait que cela.

Désormais, au lieu de ces poëmes flottants, rattachés les uns aux autres sous l’agrafe d’un même nom et d’une même pensée, paysages bretons, peints à la