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Sympathique ou antipathique, le talent de l’auteur de La Comédie de la mort est passé à l’état de fait que tout le monde voit, une dure et brillante chose, plus brillante et plus dure encore que des émaux et des camées. Étendue et affermie par vingt-cinq ans de publicité qui émietteront toujours un homme, quand il ne sera pas réellement solide, la réputation de M. Gautier (il faut bien en convenir) tourne actuellement à la gloire, et on ne touche point à cette reine. Est-ce par respect ? Je n’en sais rien. Mais ce serait maladresse. Frapper sur une gloire, c’est la faire retentir !

Et d’autant que celle-ci est vraiment méritée. Nous le disons, nous qui sommes si loin par nos doctrines de toutes les tendances de M. Gautier. Sa gloire littéraire est très-légitime et c’est sa légitimité que nous voulons montrer aujourd’hui. Il l’a mieux qu’obtenue, il l’a conquise. Il l’a gagnée à la sueur du front et de la lime, car M. Théophile Gautier est le plus puissant limeur de cette littérature volontaire qui croit trop, mais enfin qui croit que l’effort humain l’emporte, en fait de poésie, sur la divine spontanéité. Dans ce volume d’Émaux et Camées, le poète, systématique au fond, a donné sa poétique avec le prestige de sa poésie, habile homme jusque-là !

Oui, l’œuvre sort plus belle

D’une forme au travail

Rebelle ;

Vers, marbre, onyx, émail !

Et quoique cette poétique ne soit pas la nôtre,