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d’Omphale, — pour parler comme les Corybantes, — est une imitation correcte et ferme de quelques passages d’André Chénier, qui sont dans toutes les mémoires. L’auteur des Contemplations a rappelé la partie solide et artistement ciselée du poète charmant qui fut digne d’être Grec ; mais, quoique M. Victor Hugo soit parfois un habile ouvrier en poésie, il n’a pas et n’aura jamais le flottant, le diaphane et le mélodieux d’André Chénier, ce timbre qui avait des ailes !

Quant au second volume, intitulé Aujourd’hui, nous n’en pourrons indiquer non plus que la manière générale, mais cela suffira pour éclairer sur la valeur absolue d’un poète qui a touché le zénith de sa vie et de son talent. De 1843 à 1855, le poète retardé a eu le temps de devenir enfin un homme. Le jouvenceau de l’amour et du badinage ne doit plus exister, et s’il y a invention possible dans cette tête qui ne fut jamais qu’un grand front, elle devra se marquer ici. Nous allons voir !

IV

Le livre Aujourd’hui commence par une si grande douleur qu’il ne faudrait pas être un bien grand poète pour agir sur les âmes, en chantant le malheur réel que M. Hugo a chanté. Il l’a chanté, il est vrai, dans les conditions de son organisme, qui est un organisme de sensation et de vanité, car, même quand il pleure de vraies larmes, l’auteur des Contemplations