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le Breton, devenu Revue des Deux Mondes. « Heureux, ajoute-t-il, qui s’en tient aux seules émotions de l’âme, aux habitudes du foyer, aux simples soirs du pays natal… mais combien pourraient dans la vie et dans l’art négliger la science et impunément se passer d’elle ? » Et voilà pourquoi il est parti ! Voilà pourquoi ce Breton, qui n’était pas assez Breton pour être le Burns de sa Bretagne, a laissé derrière lui, dans ce pays qu’il n’aurait jamais dû quitter, la seule poésie qui se fût donnée à sa faiblesse ? … Que pouvaient et la Science et l’Art et même l’Italie pour la pauvre Muse de Brizeux ? Les filles de Bretagne s’attachent aux algues des rochers pour mieux se noyer sur leurs grèves, a dit Chateaubriand !

Il en fut donc fait ! Seulement, comme ceux-là qui regrettent le mal accompli, lorsqu’il est irréparable, Brizeux, à qui l’Italie ne donna pas de facultés nouvelles, voulut revenir une dernière fois aux inspirations premières de sa jeunesse, et le poème de Primel et Nola marqua cette volonté du retour. Il était trop tard. On ne ressuscite pas la Muse. Ce n’est pas impunément qu’un poète, fait pour rester sédentaire, est devenu nomade. Il y perd l’accent du pays. Cependant, il faut être juste, Primel et Nola et les dernières pièces de ce volume que Brizeux laisse à la Postérité, qui ne les prendra pas, je le crains bien, sont au-dessus, sans être très-haut, des pièces insupportablement affectées, métaphysiques, panthéistiques, et à contresens de toute manière sincère, qui composent le livre de La Fleur d’or. On y retrouve au moins l’observation du détail simple, ingénu, domestique, et cette couleur locale, déjà vue et goûtée dans Marie, mais que