Elle pourra lui servir, à lui, car l’esprit gagne toujours à se mettre bien en face de sa pensée, en l’exprimant. Mais comme propagande d’idées elle se perdra : en France, par son lyrisme et sa candeur même ; en Allemagne, par son manque de science réelle et de profondeur.
C’est que, pour un livre pareil, il ne suffit pas d’en avoir l’audace. Écrire la profession de foi d’un siècle qui semblait ne plus en avoir ; proclamer la seule croyance restée debout sur toutes les autres, la seule religion qui convienne à des Titans intellectuels de notre force ; proclamer la foi au progrès, la foi scientifique au progrès, imposée à tout ce qui pense, de par l’autorité même de l’histoire ; en trois mots, reprendre en sous-œuvre et refaire l’histoire des civilisations successives, de l’homme et de la création, était n’importe pour quel esprit une tentative dangereusement grandiose. M. Pelletan, qui a l’esprit ardent des hommes faits pour la vérité, a mesuré la difficulté avec son courage. Mais l’audace ne fait pas toujours la puissance, et le malheur est que, quand elle ne la fait pas, l’audace est déconsidérée.
Qu’on nous permette de l’affirmer, il n’y avait que deux manières de traiter l’immense et difficile sujet qui a tenté M. Pelletan. Et nous disons deux seules manières et non pas trois ! Ou bien il fallait l’aborder comme nous l’aurions abordé, nous chrétiens, pour qui nul mouvement de civilisation n’a dépassé le christianisme ; comme nous qui avons une révélation religieuse, primitive, écrite, inébranlable dans ses textes, une histoire, un enchaînement de faits, des sources nombreuses, toute une exégèse, toute une critique