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de les écrire avec un tour d’imagination des plus rares et qui fait fleurir la poésie jusque dans le giron austère de la Vérité ; et cette prétention a sa racine peut-être dans une ambition légitime, car, esprit intermédiaire bien plus que primaire, il peut engrener, l’un dans l’autre, deux ordres de faits différents, — les faits de l’imagination et ceux de la mémoire exacte, et il a ce style poético-scientifique ou scientifico-poétique, comme on voudra, dans lequel l’abstrait et le concret se balancent, mais pour s’énerver tous les deux !


III

C’est ce style qu’il eut dans le Kosmos, et qui fit le succès inouï de ce livre. Résumé de la science et de la vie de son auteur, un jour le Kosmos résumera sa gloire, — mais comme on résume, — en diminuant. Le Kosmos, l’idole intellectuelle de ce temps, qui cache sous un nom grec la préoccupation universelle et moderne des esprits qui ont désappris les choses invisibles du ciel, a été salué par de telles acclamations qu’on éprouve quelque embarras à jeter cette goutte d’eau froide sur tous ces fronts, brûlants et fumants d’enthousiasme : le Kosmos, après tout, n’est qu’une description. En ce vaste memorandum de physique, protocolisé par Alexandre de Humboldt, les choses, même de l’aveu de l’illustre tabellion scientifique lui-même (voir ses lettres), « sont plutôt indiquées qu’approfondies. » — « Plusieurs parties, dit-il, n’