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bien que quand on les a respires. « A /a vue d’un pareil sentiment (nous avons dit ce qu’il était, ce sentiment) ne semble-t-il pas que l’Amour lui-même a passé devant nous (bienheureuse hallucination !) et que les paroles d’Héloïse sont une vertu sortie des bords divins de sa robe ? » Et, plus loin, toujours dans le même rhythme et le même français, « deux années, urnes aux blancs cailloux, ont disparu comme un monde englouti, comme une Atlantide qui a sombré au milieu des flots, avec ses villas embaumées, ses asiles verts, consacrés à Palès (pourquoi Palès ?), ses couronnes de fleurs effeuillées sur la table des festins ! Qui nous rendra leurs nuits aux ceintures dénouées ? qui nous rendra les richesses de ces deux vaisseaux qui voguaient la voile enflée de deux soupirs, tout chargés de ravissants messages et qui n’ont pu aborder au rivage de la postérité ! Absence irréparable ! ces deux années n’ont pas laissé de traces, sœurs gracieuses qui avaient pris pour elles toutes les joies nuptiales, etc., etc., etc. » Et M. Oddoul continue ainsi, de ce style amphygouriquement superbe, dans toute l’étendue de sa dissertation.

Il a des manières à lui de caractériser l’expression des lettres d’Héloïse que Mme Guizot trouve arrangée et déclamatoire, et nous sommes bien aise de les opposer à l’opinion de Mme Guizot… mais non pour la détruire : « Tous les passages des lettres d’Héloïse ne sont qu’une paraphrase ANHELANTE du verset du Cantique des Cantiques… Sous les doigts de la nonne le feu ruisselle. On peut compter les pulsations de la veine sur le papier qu’elle a touché. » Et puis, ce cri lancé tout à coup : Ah ! Fulbert, qu’avez-