des ridicules gais, s’il y en a de tristes, par exemple, sa thèse à l’instant même s’ébrèche sur le bonheur des gens ridicules qui rappelle, du reste, un peu trop un autre livre, le livre de M. Necker, intitulé : le Bonheur des sots !
Faussée par les salons où elle a comméré toute sa vie, Mme Sophie Gay ne soupçonne pas qu’il y ait des ridicules plus profonds que des ridicules de salon. Voilà pourquoi elle s’est contentée de noter sur son album ceux qui ont défilé devant elle, croyant naïvement faire la Physiologie du Ridicule parce qu’elle nous donnait quelques-unes des physionomies qu’il peut avoir !
Et encore si ces physionomies étaient enlevées avec la verve d’un esprit caustique et comique, puisqu’elle tient plus à la comédie du ridicule qu’à son histoire, si le talent du peintre était mordant comme son idée ! Mais Mme Gay, qui a abordé la question du ridicule avec l’esprit d’un vaudevilliste, Mme Gay peint à peu près comme elle pense, et ses caricatures n’ont pas plus de profondeur que ses aperçus. Quand La Bruyère peignait des Caractères, il aurait pu se dispenser d’avoir autant de coloris et de force picturesque qu’il en avait, et le prodigue génie, il ne s’en dispensait pas ! Il pouvait s’en dispenser par la très-bonne raison qu’il faisait encore de très-grandes choses en dessinant vigoureusement ces ensembles, ces organisations entières que l’on appelle des Caractères. Mais, quand on ne tient sous son pinceau que des ridicules, il faut les faire vivre le plus possible pour qu’on les voie bien ; il faut leur donner la couleur et le relief, et le mouvement et l’intensité de la vie ; et c’est là ce qui manque le plus aux ridicules de Mme Sophie Gay !
Son livre, qui contient à peu près une vingtaine de types de l’observation la plus commune, est un écrin de cailloux que tout le monde peut, en se baissant, ramasser à ses pieds, et le style du livre n’en fait pas, certes, des pierreries ! C’est ce style faux, guindé, pré-