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journées, se promener avec elle, le matin, quand, à travers ses vêtements légers on est enivré de je ne sais quel parfum d’une nuit passée ; le soir, quand l’air est plein de tiédeurs alanguissantes, et qu’elle vous dit : « Oh ! n’est-ce pas qu’il fait bien chaud ce soir ! » en étendant les bras et en se balançant sur sa taille cambrée et sur la pointe des pieds comme si elle allait tomber en arrière sur un canapé ou sur vos genoux ; s’asseoir près d’elle, à la même place qu’elle, où elle laissa l’impression de son corps divin qui brûle ; et être là, à ses côtés, à toute heure, toujours, et dévorer ces je t’aime ! furibonds qui viennent à la bouche, et se taire, et paraître froid, et répondre, quand elle vous interroge, oui et non, comme répondent les autres, et rire avec elle d’une plaisanterie quand le cœur bout des larmes qu’on le force à contenir ; et puis, si elle se penche vers vous, si elle vous frôle le visage avec son haleine, ne pouvoir l’attirer ainsi penchée, l’absorber, ce souffle, comme une flamme et comme une rosée, jusqu’au fond de la poitrine, dans un de ces baisers affolants, ardents et humides, qui se donnent bouches entr’ouvertes, et qui dureraient des heures s’il était permis de les donner ! Et quand elle s’éloigne, quand elle tourne la