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médiocre, d’âme petite et infime, celle qui s’abandonnait à lui sans réserve. Il l’eût aimée parce qu’elle le dominait de toute la hauteur de ses facultés d’abord, parce que les bras qu’elle lui passait autour du cou étaient si beaux, et, qu’eût-elle été la dernière des prostituées à gages, il lui fût resté assez encore pour raviver d’une illusion un cœur desséché et rappeler au libertin le plus abject les plus lointains, les plus perdus souvenirs d’amour !

Mais, enfin, cet amour s’en alla. Le Temps exfolie le granit et le cœur ! Le Temps donc, et surtout une possession dont les ivresses étaient usées, eurent bientôt détruit le sentiment de Dorsay pour Hortense. Pauvre Hortense, le sien survivait. Son âme, à elle, n’était pas épuisée ; elle avait encore de l’amour, de la fièvre, des nuits d’insomnie et de délire à passer. Étrange maladie, dont les plus faibles gémissent et les plus forts souffrent plus longtemps et n’en guérissent pas !

Dorsay n’avait que deux partis à prendre. Être franc avec cruauté ou hypocrite à force de pitié et de délicatesse. Il devait tromper sur l’amour qu’il ne sentait plus, ou dire à Hortense : « C’est fini, je ne vous aime plus ! » Ce dernier parti était peut-être le meilleur