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IX

En 1611, un prêtre de Provence, nommé Louis Gaufridi, fut accusé d’avoir ensorcelé une jeune fille. Cette fille était noble et s’appelait Madeleine de la Palud. La procédure du procès existe. On y trouve détaillés des faits de possession aussi nombreux qu’extraordinaires. La science moderne, qui a pris connaissance de ces faits et qui les explique ou croit les expliquer, ne trouvera jamais le secret de l’influence d’un être humain sur un autre être humain dans des proportions aussi colossales. En vain prononce-t-on le mot d’amour. On veut éclairer un abîme par un second abîme qu’on creuse dans le fond du premier. Qu’est-ce que l’amour ? Et comment et pourquoi naît-il dans les âmes ?

Madeleine de la Palud, qui appartenait à la société éclairée de son époque, déposa que Gaufridi l’avait ensorcelée seulement en lui soufflant sur le front. Gaufridi était jeune encore, il était beau, il était surtout éloquent. Shakespeare a écrit quelque part :