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d’homme méconnue et restituée, ni lumière éteinte et rallumée dans les ténèbres. Tout ce que Valfrey croit nous apprendre, on le savait. Et, d’ailleurs, pour écrire la vie d’un homme, il faut en avoir dans la plume, et Valfrey n’en a pas… Ce minutieux de bureau ou de greffe peut bien nous exhiber les papiers de Lionne, et il nous les exhibe, mais Lionne lui-même, il ne le montre pas, et il y a plus : ce correct dans l’incolore est même incapable de le montrer !

II

Ainsi, c’est la vie qui manque dans cette Vie. Le livre commence par une déception, et une déception de près de cent pages. Quand on le lit après sa préface, on s’attend à voir surgir un Hugues de Lionne qui ne vient pas. Chose incroyable ! ce livre, qui a la prétention d’être une revendication historique et une justice tard rendue, mais enfin rendue, à un homme dont Mazarin et Louis XIV ont confisqué la gloire, — le mot me paraît vif venant d’une plume si rassise, — n’est, par le fait, rien de plus que l’exposition, inconsciente et inconséquente, des faveurs dont Lionne fut l’objet de la part de Mazarin et de Louis XIV qui, bien loin de confisquer sa gloire, lui en créèrent une dans la leur. Et comme si ce n’était pas assez pour le