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pour d’autres plumes que la sienne, tout en se contentant d’initier les autres, de les renseigner, de les instruire, de venir en aide à quelque bon travail futur, et, par ce côté-là encore, éternellement professeur !

Il ne l’avait pas toujours été. Dans son extrême jeunesse, quand il eut l’âge d’écouter et de suivre la voix de la vocation, cette sirène qui n’a pas d’écueil, la Révolution l’avait déjeté, comme tant d’autres, du chemin où naturellement ses facultés l’auraient mis. C’était en 1792. « Quand l’insurrection du Fédéralisme « éclata », — comme dit G. Mancel, le biographe de Vaultier, avec une expression peut-être un peu sonore en parlant d’une chose qui rata d’une manière si honteuse pour ceux qui croyaient la faire éclater, — Frédéric Vaultier avait vingt-deux ans. Il connut à Caen les députés de la Gironde qui s’y étaient réfugiés et se compromit avec eux. Cela devait être : il était de tempérament girondin. Il n’y a que deux tempéraments intellectuels, deux sortes d’esprits dans le monde. Il n’y en a pas trois ! Quelle que soit la livrée que la fortune ou notre volonté nous attache, philosophes ou religieux, aristocrates ou démocrates, nous sommes tous, plus ou moins, Girondins ou Montagnards. Pour toutes les questions de la vie ou de la pensée, c’est toujours ou la mort sans phrases, ou la mort avec des phrases et des sursis, que nous agitons ! Vaultier, né pour la rhétorique, sensible à ce bien dire si vain, dut être pour les phrases et les beaux parleurs de la Gi-