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pour son loisir de peuple ennuyé. Blessée dans la fibre de l’intérêt matériel, la seule fibre qui soit sensible et puisse jeter du sang chez les peuples quand ils sont gangrenés jusqu’au cœur, d’indifférente elle passe ennemie, et sa haine contre nous est aussi grande que la peur que nous lui faisons. Pour montrer à quelles proportions étranges et rapides cette haine est, d’un seul trait, montée, ne parlait-on pas, récemment, de l’empoisonnement en masse de tout le thé que, chaque année, les Chinois vendent aux Européens ?… Assurément, dans des circonstances et des dispositions aussi exorbitantes et aussi cruelles, l’avenir du Christianisme en Chine est plus que menacé ; il a cessé d’être, soyez-en sûrs ! Idées et influences chrétiennes, travaux des missionnaires, éducation des néophytes, la Chine rejettera de son sein tout ce qu’elle ne pourra pas y étouffer. Comme elle confond tous les Occidentaux avec les Barbares aux cheveux rouges qui lui ont fait la guerre, elle confondra dans une commune horreur l’Église, mère de la chrétienté, et tous les gouvernements politiques qui allongent, plus ou moins, leurs épées vers elle. Tel est le destin de la Chine, son malheur prochain, certain, inévitable, et nous ajoutons — mérité !