Page:Barbey d’Aurevilly – Littérature étrangère, 1891.djvu/240

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

grand que la main, quand cette main est celle du Génie !

IV

Ce n’est donc pas, malgré les ressources d’explication et d’interprétation de M. Charrière, un homme du premier ni du second ordre, que Nicolas Gogol, l’auteur des Âmes mortes. C’est un écrivain d’imitation plus ou moins souple, plus ou moins délié, plus ou moins habile, imprégné plus ou moins des influences européennes, mais manquant, pour toutes ces raisons, du caractère de tout ce qui est supérieur en littérature : — la sincérité. Il n’a pas la sincérité du talent. Mais tout se tiendrait-il ?… A-t-il au moins l’autre, encore plus utile et plus nécessaire, cette sincérité morale qui nous empêcherait de douter de la vérité et de la moralité de son livre contre son pays ?…

Il l’a dit un jour à Pouchkine : « Nous connaissons tous fort peu la Russie ».

Mais alors, si vous ne la connaissez pas, peintre de mœurs, pourquoi en parlez-vous ?… Ou c’est un tâtonnement audacieux et superficiel que votre affreux livre des Âmes mortes, dans lequel vous la vilipendez dans tout ce qui la constitue comme nation et comme