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guerre, et que l’argent du gouvernement, qu’ils voulaient mettre par terre, leur appartenait. Malgré ce principe, ce jour-là nous avions évité soigneusement cette diligence et ses gendarmes protecteurs, et nous avions pris la traverse, qu’en notre qualité de chouans nous connaissions très-bien pour l’avoir longtemps pratiquée… Nous arrivâmes donc d’assez bonne heure chez les paysans de la Varesnerie, et bien nous prit de n’avoir rencontré sur notre route personne de contrariant et d’avoir eu la jambe assez leste, malgré la danse d’où nous sortions, puisqu’à notre arrivée, ces paysans, qui demeuraient à un quart de lieue des faubourgs de la ville, nous apprirent que Des Touches avait été condamné la veille au soir par le tribunal révolutionnaire de Coutances, et qu’il devait être raccourci le lendemain. Il paraît, du reste, qu’il s’était conduit avec le tribunal révolutionnaire de manière à exaspérer davantage un fanatisme de haine politique qui n’avait pourtant pas besoin d’être exaspéré. Du caractère incompressible qui était le sien et qu’il ne démentit jamais, il avait dédaigné de répondre aux questions des juges, et il était resté ferme et rebelle à toutes les interrogations et même à toutes les supplications de ceux-là qui semblaient prendre intérêt à son destin, leur opposant un silence qu’il ne rompit