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cette ville, c’est à Avranches qu’il l’avait été, et il ne fut même transféré à Coutances que parce qu’à Avranches nous avions tenté de brûler la prison.

— Très-bien, dit le baron de Fierdrap apaisé, je ne savais pas, mais j’en suis enchanté, que le chevalier Des Touches eût autant coûté à la République !

— Laisse-la donc conter, Fierdrap, fit l’abbé, qui, de tous, était celui-là qui avait le plus interrompu la conteuse et qui se montrait le plus animé contre ceux qui avaient son vice, selon la coutume de tous les vicieux et de tous les interrupteurs.

— C’était donc vers la fin de l’année 1799, reprit l’historienne du chevalier Des Touches. Il y avait plusieurs mois que M. Jacques était avec nous à peu près guéri, mais affaibli et souffrant encore de ses blessures. Pendant cette longue convalescence de M. Jacques à Touffedelys, où il vivait caché, comme on vivait dans ce temps-là, quand on ne se trouvait pas le fusil à la main, au grand air, sous le clair de lune, Des Touches, lui, le charmeur de vagues, était repassé peut-être vingt fois de Normandie en Angleterre et d’Angleterre en Normandie. Nous ne le voyions pas à chacun de ses passages. Souvent, il débarquait sur des points extrêmement distants les uns des autres,