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aimait à boire jusqu’à l’ivresse. Lymphatique et nerveux, dans l’ennui de cette existence oisive et anglaise, à laquelle le Dandysme n’échappe qu’à moitié, il recherchait l’émotion de cette autre vie que l’on trouve au fond des breuvages, qui bat plus fort, qui tinte et éblouit. Mais alors, même le pied engagé dans le tourbillonnant abîme de l’ivresse, il y restait maître de sa plaisanterie, de son élégance, comme Sheridan dont on parle toujours, parce qu’on le retrouve sans cesse au bout de toutes les supériorités.

C’est par là qu’il asservissait. Les prédicateurs méthodistes (et il n’y en a pas qu’en Angleterre), tous les myopes qui ont risqué leur mot sur Brummell, l’ont peint, et rien n’est plus faux, comme une espèce de poupée sans cerveau et sans entrailles, et, pour rapetisser l’homme encore davantage, ils ont rapetissé l’époque dans laquelle il vécut, en disant qu’elle avait sa folie. Tentative et peine inutiles ! Ils ont beau frapper sur ce temps glo-

    jusqu’aux ministres d’État. Boire comme Pitt et Dundas est resté proverbe. Quand Pitt buvait, cette grande âme que l’amour de l’Angleterre remplissait, mais n’assouvissait pas, c’est de variété qu’il avait soif. Les hommes forts cherchent souvent à se donner le change ; mais, hélas ! la nature ne le prend pas toujours.