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laces de salon n’auraient-elles pas leurs illusions, comme les populaces de la rue ?

Et d’autant que ce petit livre les en guérira. Elles y verront que Brummell était une individualité des plus rares qui s’était donné uniquement la peine de naître, mais à qui, pour se développer, il fallait encore l’avantage d’une société très aristocratiquement compliquée. Elles y verront ce qu’il faut de choses… qu’elles n’ont pas, pour être Brummell ! L’auteur du Dandysme a essayé de faire le compte de ces choses : riens tout-puissants par lesquels on ne gouverne pas que des femmes ; mais il savait bien, tout en le faisant, que ce n’était pas un livre de conseil que son livre, et que les Machiavels de l’élégance seraient encore plus niais que les Machiavels de la politique…, qui le sont déjà tant ! Il savait enfin qu’il n’y avait là qu’un morcelet d’histoire, un fragment archéologique, bon à mettre, comme une curiosité, sur la toilette d’or des fats de l’avenir, ― s’ils en ont ; car le Progrès, qui est en train, avec son économie politique et sa division territoriale, de faire de la race humaine une race de pouilleux, ne détruira pas les fats, mais pourrait bien supprimer leurs toilettes à la d’Orsay, comme inégalitaires et scandaleuses.