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sira la glace, j’écrirai le nom en grosses lettres afin que vous le lisiez bien. » Mais minuit sonne. C’est vendredi, un jour malheureux. « Ah ! fit-elle, je ne vous dirai plus rien. » Quelques jours après, elle cacha dans sa poche un papier sur lequel elle avait simplement écrit : « C’est vous ! » Mais elle ne veut pas le lui donner un vendredi. « Donnez-le-moi, dit Lauzun, je vous promets de ne l’ouvrir qu’après minuit. » Mais elle craint, elle hésite encore, quand le lendemain après dîner, il vient chez la reine, et alors elle écrit cette page ravissante dont les détails sont pour moi d’un charme inexprimable :

« Lorsque la reine fut entrée dans son prie-Dieu, je me mis seule avec lui au coin de la cheminée, je sortis mon papier ; je le lui montrais et après je le remettais dans ma poche et d’autres fois dans mon manchon. Il me pressa extrêmement de le lui donner. Il me disait que le cœur lui battait ; qu’il croyait que c’était un pressentiment, que j’allais lui donner l’occasion de rendre un mauvais service à quelqu’un, s’il désapprouvait mon choix et mes intentions. Cette manière de conversation dura bien une heure, mais nous nous trouvâmes aussi embarrassés l’un que l’autre et je lui dis : Voilà le papier. Je vous le donnerai à