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La langue en peu de mots en explique beaucoup.
Les yeux plus éloquents font tout voir tout d’un coup
Et de quoi qu’à l’envi tous les deux nous instruisent,
Le cœur en entend plus que tous les deux n’en disent !

Après cet oracle du génie, elle n’hésite plus. Elle est fixée, et elle porte son projet de mariage jusque devant le Saint-Sacrement. Elle voit (un 2 mars) M. de Lauzun chez la reine. « Il aurait dû deviner, dit-elle, quand je passais devant lui, ce que j’avais dans le cœur pour lui, à la gaieté avec laquelle je lui parlais. » Mais comme Lauzun n’a pas l’air du tout de comprendre de dessous le respect dont il se couvre, elle invente de lui parler d’un mariage avec le duc de Lorraine et de lui en demander son avis…

Et c’est ici que la plus délicieuse comédie commence — c’est la comédie de l’amour. Elle veut être comprise, et lui — qui comprend bien — ne veut pas comprendre. Elle lui tend la glace qu’elle fend, pour qu’il achève de la rompre. Ce n’est plus qu’une faible et transparente surface, mais il ne la rompt pas… Il n’y pose pas même le bout du doigt qui, en la touchant, la romprait. Lauzun devient le plus gracieux, le plus profond, le plus impatientant Tartufe de respect qui fut ja-