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traordinaire (c’est toujours la grande impression qu’il lui fait), très agréable en conversation, et je cherchais les occasions de lui parler. Je lui trouvais des manières d’expression que je ne voyais pas dans les autres gens. »

Tel fut donc son premier charme, à ce charmeur ! Dans ce grand siècle de la Convenance et dans ce cœur marbrifié de princesse, vous sentez bien qu’il n’y a pas ce que le siècle suivant appela le coup de foudre. On n’est pas nerveux et le magnétisme du regard est inconnu. Lauzun s’enfonce peu à peu dans l’attention de cette femme ennuyée et qui trouvait probablement, et peut-être sans bien s’en rendre compte, que tout se ressemblait par trop dans cette cour solennelle. Comme, si princesse qu’on soit, on a encore de la vanité féminine, l’homme à femmes en Lauzun donnait son petit coup d’aiguillon dans ce sang si fier. Elle dit en parlant d’Henriette d’Angleterre, duchesse d’Orléans : « Je n’avais aucun soupçon qu’il pût avoir pour elle de la galanterie… de cet attachement qu’il lui était ordinaire d’avoir pour beaucoup de dames. » À ce moment elle commence de voir dans son cœur. « Dieu (dit-elle avec une gravité à la Bossuet) est le maître de nos états. Il nous y laisse autant que la vanité de nos esprits le peut souffrir.