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d’Artelles, interrompant les ricanements du vieux roué qui se permettait l’ironie. — Vous savez fort bien avec quoi on l’expliquerait, et vous, tout le premier ! sans qu’il en résultât beaucoup de gloire pour M. de Marigny, qui mourra, sans doute, dans l’impénitence finale d’un goût enragé.

— Un goût enragé et passé à l’état chronique, sans cesser, pour cela, d’être à l’état aigu, — repartit M. de Prosny, — c’est peut-être la meilleure définition qu’on puisse donner de l’amour. Ce qu’il y a de sûr, c’est que Marigny aurait dans le cœur un de ces sentiments dont vous autres femmes composez des religions, et qui contiennent les sept sacrements de l’amour, qu’il n’agirait pas autrement qu’il ne fait, à cette heure, avec sa señora Vellini.

— Elle lui a empoisonné l’âme ! — dit madame d’Artelles, échauffée par les indignations qu’elle couvait en écoutant le résumé du vieux Prosny.

— Je ne dis pas non, — reprit le vicomte, — mais avec quel poison, madame la comtesse ? Tout est là. Elle a créé en lui des besoins d’elle, infinis, éternels, que les plus ravissantes personnes avant Hermangarde, et Hermangarde par-dessus le marché, n’ont pu assoupir, ni faire oublier. En amour, même