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il triste que parce qu’il ne pouvait lui rendre le repos qu’elle avait perdu ?

Toujours est-il qu’il n’avait pas revu Vellini. Quand il l’avait quittée sur la falaise, où était-elle ? Quelles avaient été leurs dernières paroles ? S’étaient-ils promis de se revoir ? Les adieux, les anciens adieux auxquels Ryno en avait tant appelé, avaient-ils été de nouveau prononcés entre eux, élevés entre eux comme une barrière ?… Qu’étaient-ils devenus, lorsque madame de Marigny eut atteint la plate-forme de la tour ruinée ? Ryno le savait sans doute, et ce qu’il savait dicta sa conduite. Il affecta pendant quelques jours de ne plus sortir ou de sortir avec sa femme. Il répondait à ses jalousies muettes en ne la quittant plus.

Du reste, chaque jour l’hiver, qui s’avançait d’un pas, rendait plus rares leurs promenades. Ils ne voyaient presque plus que des fenêtres de leur grand salon le paysage maritime qu’ils avaient si souvent parcouru. Éclairé par un ciel habituellement gris et bas, qui en pressait de toutes parts l’étendue monotone, il s’harmonisait bien avec l’état de leurs âmes. C’était l’infini nuageux de leur amour ! Il en avait l’immensité et la teinte déjà soucieuse. Bientôt, le vent qui s’engouffrait dans cette anse devint si piquant qu’il fallut renoncer à la niche et à la falaise. Ils se contentaient alors de descen-