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quivaloir mathématiquement qu’à une, et que pour faire toutes ces poésies, on pouvait s’épargner l’emploi de ces trente-six cervelles — une seule suffisait !

Oui, un seul de ces Parnassiens suffisait pour nous jeter, en une fois, ces trente-six cruches d’ennui sur la tête, mais ceci est particulier à ce temps délicieux où tout le monde veut être l’égal de tout le monde, et dont nous avons bien raison d’être fiers… Les Parnassiens sont tous entre eux égaux, et, par conséquent (j’excepte toujours M. Théophile Gautier) n’ont point de raison pour être trente-six. Le mot de Piron devient une vérité. De son temps, ce n’était là qu’une épigramme. Ils sont quarante — disait-il des Académiciens — et ils ont de l’esprit comme quatre. Les Parnassiens, eux, qui sont trente-six, n’en ont pas comme un. Ces trente-six frères Siamois de la même poésie, unis, tous les trente-six, par la même longe, n’ont aucune individualité distincte l’une de l’autre. Il y a entre eux des différences de force dans le faux, mais il n’y en a point dans l’essence même. Il est évident que M. Leconte de l’Isle, par exemple, — M. Leconte de l’Isle, à qui j’en veux, parce que le système tue en lui le vrai poëte qui peut-être y est, — ne saurait jamais tomber au niveau de M. Catulle Mendès, son Vacquerie, quoiqu’ils soient Indiens tous les deux ; mais M. Leconte de l’Isle et M. Mendès — il m’en coûte de le dire — n’en