que vous ferez, messieurs, — répondit lentement Mesnilgrand ; — mais quant à moi, avant de partir pour l’autre monde, je veux faire à tout risque mon porte-manteau.
Et, ce mot d’officier de cavalerie fut si gravement dit qu’il y eut un silence, comme celui du pistolet qui tirait, il n’y a qu’une minute, et tapageait, et dont la détente a cassé.
— Laissons cela, du reste, — continua Mesnilgrand. — Vous êtes, à ce qu’il paraît, encore plus abrutis que moi par la guerre et par la vie que nous avons menée tous… Je n’ai rien à dire à l’incrédulité de vos âmes ; mais puisque toi, Rançonnet, tu tiens à toute force à savoir pourquoi ton camarade Mesnilgrand, que tu crois aussi athée que toi, est entré l’autre soir à l’église, je veux bien et je vais te le dire. Il y a une histoire là-dessous… Quand elle sera dite, tu comprendras peut-être, même sans croire à Dieu, qu’il y soit entré.
Il fit une pause, comme pour donner plus de solennité à ce qu’il allait raconter, puis il reprit :
— Tu parlais de l’Espagne, Rançonnet. C’est justement en Espagne que mon histoire s’est passée. Plusieurs d’entre vous y ont fait la guerre fatale qui, dès 1808, commença le désastre de l’Empire et tous nos malheurs.