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et qui avaient osé l’adultère sous les yeux mêmes de la comtesse. Mais le mariage, le mariage effrontément accompli au nez de Dieu et des hommes, mais ce défi jeté à l’opinion de toute une contrée outragée dans ses sentiments et dans ses mœurs, j’en étais, d’honneur ! à mille lieues, et si loin que quand, au bout des deux ans du deuil de Serlon, la chose se fit brusquement, le coup de foudre de la surprise me tomba sur la tête comme si j’avais été un de ces imbéciles qui ne s’attendent jamais à rien de ce qui arrive, et qui, dans le pays, se mirent alors à piauler comme les chiens, fouettés dans la nuit, piaulent aux carrefours.

« Du reste, en ces deux ans du deuil de Serlon, si strictement observé et qui fut, quand on en vit la fin, si furieusement taxé d’hypocrisie et de bassesse, je n’allai pas beaucoup au château de Savigny… Qu’y serais-je allé faire ?… On s’y portait très bien, et jusqu’au moment peu éloigné peut-être où l’on m’enverrait chercher nuitamment, pour quelque accouchement qu’il faudrait bien cacher encore, on n’y avait pas besoin de mes services. Néanmoins, entre temps, je risquais une visite au comte. Politesse doublée de curiosité éternelle. Serlon me recevait ici ou là, selon l’occurrence et où il était, quand j’arrivais. Il n’avait pas le moindre embarras avec moi. Il avait repris sa