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même un juge difficile. Le nombre des auditeurs augmentait insensiblement. Mme Thillard et sa mère, M. Durosoir, Destroy, Rodolphe et quelques autres, formaient déjà le noyau d’une société qui allait se développer et s’étendre jusqu’à faire la maison trop petite. Bien des témoins desdites séances musicales ne se gênaient pas pour en parler au dehors. Dans le milieu où avait précédemment vécu Clément, où il avait été vilipendé, regardé comme le plus abject des hommes, d’où finalement il avait été ignominieusement repoussé, chassé, circulaient mille détails à sa louange qui y donnaient grandement à réfléchir. Celui que, d’une voix presque unanime, on avait été jusqu’à proclamer un misérable passible de la cour d’assises dépouillait peu à peu, aux yeux mêmes de ses plus implacables accusateurs, ses souillures, ses sentiments crapuleux, ses travers, ses vices, ses fautes, et cessait d’être criminel et répugnant pour devenir un personnage digne de considération. Avec des gradations ménagées, pour sauvegarder les apparences, on allait actuellement à sa rencontre. Il n’apercevait plus que des visages avenants et gracieux. Il trouvait chaque jour quelque nouveau nom chez son concierge. On l’accablait littéralement d’offres de service. Il ne devait pas tarder enfin à être effrayé du chiffre de ses amis et à se voir contraint d’en consigner la moitié à sa porte.