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toujours les ressources de leur avoir personnel. Qu’est-ce que je devins donc quand je m’aperçus que M. Thillard, qui probablement combinait déjà sa fuite, fondait des espérances sur sa femme et sur sa belle-mère, et ne préméditait rien moins que de les dépouiller toutes deux ? Ah ! je fus pire qu’un diable. Trente années passées dans la maison me donnaient bien d’ailleurs quelque droit. Hors de moi, je jurai à madame Ducornet et à sa fille que M. Thillard avait creusé un abime que des millions ne combleraient pas, et les suppliai, à mains jointes, de prendre pitié d’elles-mêmes. Mais, ouiche ! qu’est-ce que je pouvais peser, moi, vieux radoteur, à côté d’un homme jeune, beau garçon, brillant, spirituel, qui était adoré de sa femme à laquelle il faisait accroire ce qu’il voulait ! Il joua auprès d’elle sa comédie d’habitude, eut l’air de l’aimer plus que jamais, et, finalement, arracha à l’aveugle faiblesse des deux femmes les signatures dont il avait besoin.

— Quel misérable ! dit Max indigné.

— Oui, misérable, en effet, ajouta le vieillard en secouant la tête, et plus que vous ne pensez. Aussi, il avait trop d’avantages superficiels pour ne pas être mauvais au fond. Un homme ne peut pas tout avoir, que diable ! Je n’avais pas attendu jusqu’à ce jour pour reconnaître qu’il manquait absolument de cœur. Il sortait de parents extrêmement pauvres qui s’étaient imposé les plus dures privations pour lui