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Et son cœur est heureux puisqu'il est sans remords.
Au fond d'un noir cachot, vers le ciel qu'elle implore
Élevant ses beaux yeux, où brille la ferveur,
Elle tombe à genoux : « Dieu clément, que j'adore,
Dit-elle, à ta bonté s'adresse ma douleur.
C'est toi qui fais passer de l'ombre à la lumière,
De la vie à la mort, du trône à la chaumière ;
Tu peux tout, et je sais que le sort des humains,
Leurs peines, leurs plaisirs reposent dans tes mains :
Ne m'abandonne pas au jour de l'infortune ;
Arbitre des mortels, ne crains pas que mon cœur,
Élevant jusqu'à toi sa prière importune,
Te redemande encor le sceptre et le bonheur :
Frappe, je te bénis ; mais épargne mon père,
Mais d'un époux chéri détourne ta colère. »
Elle dit : vers les cieux prenant un libre essor,
L'ange de l'espérance emporte sa prière.
Le sommeil tout-à-coup vient fermer sa paupière,
Et l'asseoir sous un dais brillant de pourpre et d'or ;
D'un cortège pompeux elle est environnée ;
Un peuple adorateur se presse sur ses pas,
Et sa fière rivale, à ses pieds amenée,
Attend, en frémissant, l'arrêt de son trépas :
Mais la jeune beauté ne connaît point la haine,
Et veut, par des bienfaits enchaîner tous les cœurs.
Elle presse Marie entre ses bras vainqueurs,
Dans son abaissement voit encore une reine,
Et lui fait partager les suprêmes honneurs.