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Sous le parvis désert aussitôt il s'élance.
Cependant Amélie, en un morne silence,
Demeure encor plongée, et son époux en pleurs
S'efforce d'apaiser de trop justes frayeurs :
« Toi que me disputait la fortune jalouse,
Il n'est plus de péril.... ô ma charmante épouse,
Renais sous mes baisers, ouvre enfin tes beaux yeux ! »
Il dit. Un long éclair pénètre dans ces lieux,
Et, d'un bleuâtre éclat entourant la statue,
La dévoile aux regards d'Amélie abattue.
« Ma mère ! » A ce nom seul, à ce plaintif accent,
L'écho de ces vieux murs répond en gémissant.
L'orage alors redouble : au fracas du tonnerre,
Au choc des éléments, tremble et s'ouvre la terre ;
De ses flancs déchirés mille feux ont jailli ;
D'épouvante Orsano lui-même a tressailli.
Sur le sol chancelant, Amélie incertaine
Aux pieds de la statue avec effort se traîne,
Et les presse en criant.... ma mère, me voici !
La foudre éclate alors dans le ciel obscurci :
Tout tremble ; la statue, à sa base arrachée,
Sur la triste Amélie, à l'instant, s'est penchée,
Semble étendre les bras, tombe enfin ; et son poids
La renverse sanglante, et meurtrie, et sans voix.
Un moment de sa force elle a repris l'usage :
« Adieu, cher Orsano ; rappelle ton courage ;
Tu vois.... » Le lendemain, immobiles, glacés,
On les trouva tous deux se tenant embrassés.