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POÉSIES

Sans parents, sans appui, je n’ai que ton amour.
A quel affreux destin les combats m’ont réduite !
Un silence éternel règne dans Selama (2).
La tombe a dévoré mon père,

Il s’est éteint, le feu qui l’anima ;
Et ce vieillard n’est plus qu’une froide poussière.
Les voiles de la nuit embrassaient l’univers ;
Les flots tumultueux, appaisés par les ombres,
Rampaient au pied des rocs que la mousse a couvert*,
Et les hiboux, cachés dans leurs retraites sombres,
Troublaient seuls par leurs cris le silence des airs.
Assise sur les tours de mon palais antique,
Je songeais à mon frère, au généreux Colmar,
Qui loin de nous combattait Caïrbar,
Quand soudain à mes yeux, pale, mélancolique,
Se présente mon père ; un glaive arme sa main,
Et de fréquents soupirs s’élèvent de son sein.
« Darthula, me dit-il, ma famille est éteinte ;
» Ton frère infortuné vient de perdre le jour î
» Mais d’un coup plus amer ma vieillesse est atteinte,
» Et c’est encor sur toi que gémit mon amour.
» Caïrbar triomphant, suivi de son armée,
» S’avance vers ces lieux, et nous porte des fers.
» Qu’il vienne, je l’attends ; ma valeur ranimée
» Pourra venger les maux que nous avons soufferts.
» Prends ce casque, arme— loi du glaive de les pères,
» Demain, dès que le jour aura sur les bruyères