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Impitoyable dieu, pourquoi m'as-tu fait naître ?

Pourquoi, si ton courroux a besoin de mes pleurs,
Par l'aspect de ta gloire irriter mes douleurs ?
Fallait-il m'entourer de tes pompeux ouvrages,
Suspendre sur ma tête, au-dessus des nuages,
Ce firmament d'azur, ces mondes enflammés,
Ces globes d'or roulant, pour toi seul allumés ?
Fallait-il tout soumettre à mes lois souveraines,
De la terre, à mes mains, abandonner les rênes,
Et, pour me replonger dans une nuit d'effroi,
Me ravir au néant qui me sauvait de toi !...
Malheureux ! Qu'ai-je dit ? Abjurons ce blasphème !
C'est trop calomnier la clémence suprême ;
Non, par un vain orgueil mon esprit tourmenté
Ne rêva point la gloire et l'immortalité.
Pour un monde éternel j'ai reçu la naissance ;
Tout, jusques au sommeil, m'en donne l'assurance.
De tranquilles pavots quand mes yeux sont couverts,
Mon âme veille encore et parcourt l'univers.
Tantôt, développant ses ailes fantastiques,
Sur la cime des monts ou des temples antiques
Elle plane : tantôt du lointain horizon
Elle descend, et vient effleurer le gazon.
Souvent elle traverse une forêt sauvage ;
Rêveuse, elle s'enfonce au sein du noir ombrage ;
Ou, d'un vol inconstant, dans les plaines des cieux,
Légère, elle se trace un chemin radieux.

Elle vient se mêler à la troupe folâtre