Page:Baour-Lormian - Ossian, suivi des Veillées poétiques, 1827.djvu/303

Cette page n’a pas encore été corrigée

Hélas ! Il ne voit pas, de son néant charmé,
Qu'il respire au milieu d'un peuple inanimé.
Le monarque superbe, à qui tout rend hommage,
Voudrait fuir, à son tour, cette importune image :
En vain, pour s'étourdir sur ses derniers instants,
Il s'entoure de jeux, de hochets éclatants :
En vain dans ses banquets tout son faste s'étale.
Le spectre affreux s'assied à la table royale ;
Et, convive sanglant, d'un oeil plein de courroux,
Il désigne la place où tomberont ses coups.

Qu'est ce monde lui-même ? Un tombeau sans mesure.
La terre des vivants, rebelle à la culture,
Ingrate et s'endormant dans son oisiveté,
À la destruction doit la fécondité.
La substance des morts dans ses veines fermente.
Quelle poussière, ô ciel ! N'a pas été vivante ?
La bêche et la charrue, en nos jardins fleuris,
De nos aïeux en poudre exhument les débris.
Avec l'or des moissons ils flottent et s'unissent
Au pain réparateur dont leurs fils se nourrissent.
Quand l'âme, rappelée au trône de son dieu,
Monte et vole vers lui sur des ailes de feu,
Le soleil de nos corps boit la flamme éthérée,
La terre en ressaisit la dépouille altérée,
Et tous les éléments se disputent entr'eux
D'un souverain détruit les restes malheureux
Ma vue, à cet aspect, d'épouvante glacée....
Ciel ! La mort est partout, hors dans notre pensée.