se reposer et de se croire libre. Avec Boileau, qui fait, lui aussi, sa confession sincère, c’était tout autre chose. Elle faisait comme le chien de Jean de Nivelle et s’enfuyait comme si elle avait eu le feu à ses cottes. Aussi le législateur du Parnasse, qui en effet, comme poëte, n’a pas fait au- tre chose que de dicter des lois à une montagne, exprimait-il ingénument ses chagrins à Molière, dont la facilité le déroutait et bouleversait toutes ses idées :
Rare et fameux Esprit, dont la fertile veine
Ignore en écrivant le travail et la peine ;
Pour qui tient Apollon tous ses trésors ouverts.
Et qui sais à quel coin se marquent les bons vers ;
Dans les combats d’esprit savant Maître d’escrime,
Enseigne-moi, Molière, où tu trouves la rime.
On dirait, quand tu veux, qu’elle vient te chercher.
Jamais au bout du vers on ne te voit broncher ;
Et sans qu’un long détour t’arrête, ou t’embarrasse,
À peine as-tu parlé qu’elle-même s’y place.
Mais moi qu’un vain caprice, une bizarre humeur
Pour mes péchés, je crois, fit devenir Rimeur :
Dans ce rude métier où mon*esprit se tue.
En vain pour la trouver je travaille et je sue.
Souvent j’ai beau rêver du matin jusqu’au soir :
Quand je veux dire blanc, la quinteuse dit noir.
Si je veux d’un galant dépeindre la figure.
Ma plume pour rimer trouve l’Abbé de Pure :
Si je pense exprimer un Auteur sans défaut,
La Raison dit Virgile, et la Rime Quinaut.
Boileau. A M. de Molière. Satires, ii.