PAR UN VERS MASCULIN.
Voulentiers en ce mois icy
La terre mue et renouvelle.
Maintz amoureux en font ainsi,
Subjectz à faire amour nouvelle
Par légèreté de cervelle,
Ou pour estre ailleurs plus contens ;
Ma façon d’aymer n’est pas telle,
Mes amours durent en tout temps.
N’y a si belle dame aussi
De qui la beauté ne chancelle ;
Par temps, maladie ou soucy,
Laydeur les tire en sa nasselle ;
Mais rien ne peult enlaydir celle
Que servir sans fin je prétens ;
Et pource qu’elle est toujours belle,
Mes amours durent en tout temps.
Celle dont je dy tout cecy,
C’est Vertu, la nymphe éternelle.
Qui[1] au mont d’honneur esclercy
Tous les vrays amoureux appelle.
« Venez, amans, venez (dit-elle,)
Venez à moi, je vous attens ;
Venez (ce dit la jouvencelle).
Mes amours durent en tout temps.
- ↑ Le lecteur a remarqué ces deux hiatus : au premier vers de la seconde strophe N’y a et au troisième vers de la troisième strophe Qui au. Clément Marot, né vers 1497, mourut en l’automne de 1544. Or, (je le répète une dernière fois), la règle qui décréta la suppression de l’hiatus ne date réellement que de Ronsard (1524-1585).