croit qu’un moyen manque et nous fait défaut, quand au contraire il est depuis des siècles à notre disposition. Cela tient surtout à cette cause que de notre temps, dans l’artiste et dans le poëte, on n’a voulu voir que le penseur, le prophète, le vates, qui certes existe en lui ; mais il doit contenir aussi un ouvrier, qui, comme tous les ouvriers, doit avoir appris son métier par imitation et en connaître la tradition complète.
Chose étrange et sur laquelle je ne saurais revenir trop souvent ! personne n’aurait l’idée de créer à nouveau, de tirer de son âme, d’inventer de toutes pièces le métier de la menuiserie ou celui de la serrurerie, et cependant on a la prétention de savoir, sans l’avoir appris, le métier de la poésie, qui est le plus difficile de tous ! Tel menuisier de village façonne une colonne torse mieux que nos ébénistes d’art, parce qu’il se borne à reproduire fidèlement les modèles que lui ont laissés son père et son aïeul, menuisiers comme lui. Tâchez d’être aussi sages que ces artisans, et ne remplacez pas par des monstres nouveaux les modèles excellents qui vous ont été légués. Mais c’est assez nous arrêter à ce qu’il ne faut pas faire, et je ne puis mieux clore cet épisode que par un conseil dont je recommande à mes lecteurs la sagesse pratique :