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NOUS TOUS.


En sa jeunesse, elle était rousse ;
Et fauve alors comme un lion,
Ressemblait, avec sa frimousse,
Aux Faunesses de Clodion.

En ce temps-là, c’étaient ses fêtes,
Marchant gaîment sur le carreau,
Elle venait chez les poètes
Et buvait un peu de leur eau.

Bien plus tard, je l’ai retrouvée,
Laissant le vent rougir ses mains,
Et tout doucement arrivée
Où conduisent tous les chemins.

Elle n’était plus teinturière,
Pauvre jouet du destin fou,
Et même, son ardeur guerrière
S’était enfuie, on ne sait où.

C’était une petite vieille,
À qui l’âge n’avait donné
Qu’un peu de misère, et pareille
À l’enfant toujours étonné.