veau, la cruelle enfant Hélène, rassemblant ses bijoux barbares pour s’enfuir avec le fils d’Ethra, le long des fleuves bordés de lauriers-roses ! Cette fois-là, comme les autres, il la prit par la main et l’emmena. Ils se sont mariés un mois plus tard, et depuis lors Margueritte ne va plus chez les marchands de vin pour y boire l’eau-de-vie au goût de poivre ; il la boit chez lui, comme vous l’avez vu, dans l’armoire. Céliane, qui le méprise et le hait de tout l’amour qu’il a toujours eu pour elle, le brutalise avec d’horribles façons de mégère, tandis qu’au contraire sa mère le choie comme un bambino et l’endort le soir en lui chantant des chansons de nourrice. Mais, par un singulier caprice de sa folie, il se figure que c’est Céliane qui lui dit des choses douces et sa mère qui le maltraite ; quand sa mère lui adresse un de ces mots affectueux qui guérissent les plus cuisantes blessures, il lui lance en dessous un regard de haine, et, sous les injures de Céliane, il s’arrête extasié, comme s’il entendait la harpe d’un ange ! Enfin, il croit reconnaître la voix de Céliane dans cette voix qui chante des chansons de nourrice pour l’endormir ! Toutefois il se livre contre sa méchante femme à une vengeance à la fois terrible et bien involontaire. Comme, en entrant dans le cabaret où il l’a retrouvée, il a entendu les soldats attablés avec elle la nommer Aglaé, ce nom lui est resté dans la mémoire, et chaque fois que Céliane lui jette les épithètes de crétin ou de misérable, il la remercie avec un charmant sourire, mais toujours en l’appelant : Chère Aglaé ! Ainsi, dans son innocente manie, il lui rappelle à chaque instant le bourbier d’où il l’a tirée, car la vérité sort de la bouche des enfants !
— Allons ! dis-je avec mélancolie, en voilà un qui a