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liers de cailloux lancés par une invisible main, — tombent dans le gouffre.


CXX. — L’INEFFABLE

— « Quoi ! murmurent les Âmes humiliées et se regardant avec horreur, nous chargées de fautes et de haines et souillées de taches funèbres, nous sommes accueillies, ô pitié ! dans la rafraîchissante clarté du Vrai et dans le ravissement qui ne doit jamais finir !

— Ô chères Âmes, dit le doux Enfant vêtu de blancheur dans la clarté, calme et levant son doigt victorieux, comme lorsqu’il parla devant les docteurs, ne comprenez-vous pas que le pardon est un fleuve toujours débordé ? Ah ! ne frissonnez plus d’épouvante, mais au contraire élancez-vous d’un vol sûr vers la candeur des chastes lys et vers la gloire immortelle des roses ! Car Celui qui vous a pétries de ses mains peut aussi laver et effacer vos crimes dans le flot de son immense amour. »

Et tandis que s’effacent et s’évanouissent, dévorés par la lumière extasiée, les murailles de fer, les tristes lacs glacés, les citadelles d’airain, les rouges brasiers fumants et les cercles effrayants de la Nuit, — azur eux-mêmes, les arches, les escaliers, les pilastres du paradis s’entassent les uns sur les autres dans l’azur, au loin, toujours se dressant vers les palais et les jardins de joie, ouverts,