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HUITIÈME DOUZAINE



LXXXV. — RESSOUVENIR

Elle et Lui, les deux Âmes, les deux Clartés, les deux Esprits bienheureux, Théro et Celmis, revêtus de leur grâce géante, unis, appuyés l’un sur l’autre, étroitement embrassés, ils s’avancent d’un pas et d’un vol rhythmiques à travers les clairs paradis. Ils ont traversé la ville de diamant dont les flèches s’enchevêtrent, et les hautes forêts de violettes, et le doux fleuve large comme vingt océans, sur la rive duquel est planté un rosier unique, dont les rameaux chargés de fleurs abritent sous leur ombre tous les vastes flots. Doucement ravis par la résonnance des parfums subtils et par les silencieuses musiques, ils sont maintenant dans une large clairière, d’où ils aperçoivent dans les éthers infinis tous les troupeaux de constellations et d’étoiles.

— « Tiens ! dit Celmis, regarde au loin cette toute petite et fugitive étincelle. C’est la Terre. Te souvient-il encore que nous avons habité là ? Oui, bien des milliers