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peut se présenter chez le traiteur où mangent ses camarades, et il est vêtu, en 1882 ! d’une polonaise verte, qui n’a plus d’olives, mais qui en a eu ! Avec l’intrépidité du désespoir, Florigny lutte contre une tête de lapin qui rira bien, parce qu’elle rira la dernière, et tandis qu’il s’acharne sur elle, un grand chien funèbre et jaune, vautré sous la table, s’acharne sur ses mollets à lui, et les dévore. Ennuyé à la fin, l’acteur allonge au chien un coup de pied ; mais un regard de son voisin, le sage croque-mort Pastre, lui fait aussitôt comprendre l’imprudence de sa conduite.

En effet, ce fonctionnaire indique par un geste vite réprimé l’épouvante que doit inspirer à tout consommateur soucieux de ses intérêts la toute-puissante maritorne, et sans doute exprimant par une hyperbole saisissante et bien parisienne l’intense amitié avec laquelle les vieilles gens s’attachent à leurs bêtes, se penche vers Florigny et lui murmure tout bas à l’oreille :

— « Si vous voulez qu’Eulalie soit aimable pour vous, ne faites pas de mal au chien. C’est son amant. »


LXXV. — LA SYBARITE

L’adorable Isidore Nieul est voluptueusement couchée entre ses draps de toile de Flandre, qui, presque aussi doux que sa chair, l’enveloppent et la caressent. À la