Page:Banville - Dans la fournaise, 1892.djvu/121

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ANNA


À Jacques Madeleine.


C’est ainsi que le Temps nous les métamorphose
Et ce tas d’ombre fut une déesse rose ;
Dans la sombre améthyste on gravait ses profils,
Et le Désir restait captif dans ses grands cils.
Oui, c’est Anna ! Regarde, ô Jacques Madeleine,
Ce monstre grelottant dans son haillon de laine.
Les ennuis éternels grincent, inapaisés,
Sur sa bouche entr’ouverte où nichaient les baisers.
Cette vieille, qui fut jadis pleine de gloire,
Est terne et sans couleur, comme la terre noire ;
Ses cheveux sur son front meurtri par le remords
Tombent sinistrement comme des serpents morts ;