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LES EXILÉS


Némée


Dans la vallée où passe une haleine embaumée,
Hercule combattait le lion de Némée.
Rampant, agile et nu, parmi les gazons ras,
Parfois il étreignait le monstre dans ses bras,
Puis le fuyait ; et, plein de fureur et de joie,
Par un bond effrayant revenait sur sa proie.
Au loin sur les coteaux et dans les bois dormants
On entendit leurs cris et leurs rugissements ;
Ils étaient à la fois deux héros et deux bêtes
Mêlant leurs durs cheveux, entre-choquant leurs têtes,
Hurlant vers la clarté des cieux qui nous sont chers,
Avec la griffe et l’ongle ensanglantant leurs chairs ;
Haletants, ils ouvraient leurs deux bouches pensives,
Montrant dans la clarté leurs dents et leurs gencives ;
Puis, vautrés l’un sur l’autre, ils tombaient en roulant
Sur les pentes en fleur, dans le sable sanglant.
Enfin, d’un cri sauvage effrayant les ravines,
Hercule prit le monstre entre ses mains divines ;