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le sang de la coupe

Le poëte, ruffian de la Muse divine
Qu’il adorait hier dans le temple idéal,
La prostitue au lit de quelque baladine ;
Et, portant au hasard son sarcasme banal,
Chaud encor des baisers de cette Messaline,
L’insulte pour deux sous au bas d’un grand journal.

Que m’importent, dit-il, vos lèvres et vos couches,
Ô vierges de quinze ans, au sourire enchanté ?
La maîtresse qu’il faut à ma virilité
C’est la déesse aux yeux caressants et farouches
Qui me loue et me baise avec ses mille bouches,
L’ange des carrefours, la Popularité !

C’est elle dont le souffle, ainsi qu’un phare allume
Une lueur au front qu’enveloppait la brume,
Elle qui, les deux bras tendus à l’univers,
Arrête les passants pour leur chanter mes vers,
Et qui saura pétrir avec l’airain qui fume
Mon buste couronné de lauriers toujours verts.

En habit de gala, les courtisanes vaines
Sur le front de l’Amour posent leurs pieds lassés.
Plus pâles que la neige au sommet des Cévennes,
Ces folles, dont le vent baise les seins glacés,
Pour réchauffer la pourpre éteinte dans leurs veines
Boivent l’or et le sang des pâles insensés.