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histoire de la ballade

un rimeur de Ballades, de préférence à tout autre poëme. Le Sonnet était encore trop goûté, malgré les Cotins et les Orontes, le Rondeau trop bien en cour avec Bensserade, Voiture et Sarrazin. La Ballade seule était un genre assez archaïque, assez passé de mode et suranné, comme dit Trissotin, pour agréer à un amateur de vieilleries, à un cuistre en us, bardé de grec et de latin. Ménage, l’original présumé du personnage de Vadius, Ménage qui, en horreur du langage vulgaire, célébrait ses amours en italien et en grec, se serait peut-être permis le français dans la Ballade ; il serait même surprenant qu’il ne l’eût pas fait. Mais quel trait à ajouter à la physionomie d’un pédant, que de lui faire réciter une complainte, ou une romance ! Le public du Théâtre-Français ne se le dissimulait pas ; et, faute de le comprendre, il perdait une nuance du caractère comique.

Si Vadius n’eût pas été si rudement interloqué par son introducteur, ce n’est pas une romance qu’il eût récitée, ni une complainte, ni quoi que ce soit en stances d’un nombre indéterminé, de coupe et de mesure arbitraire. Il eût défilé de sa voix chevrotante trois strophes d’égale longueur et de même mesure, correctement composées sur les mêmes rimes, et les eût couronnées, en guise de bouquet, d’une demi-strophe adressée sous le titre d’Envoi à Philaminte ou à Bélise où il eût accumulé, marié et