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le sang de la coupe

Et mes pieds blancs qui sur le sable
Font une empreinte insaisissable.
C’est à moi, c’est à moi d’avoir le fruit doré.

Cypris.

Dans la nuit où le sang d’Ouranos abhorré
Souilla l’Océan vaste,
Où Thétis dans ses bras, qu’en naissant j’honorai,
Me porta jeune et chaste,

Vers Cypre aux bords charmants, que baignent de grands flots
J’abordai solitaire,
Et tu vis sous mes pas le doux printemps éclos
Quand je touchai la terre.

Tu vis dans ces beaux lieux, d’où l’épouvante fuit
Sans que tu t’en irrites,
Paraître le riant Éros, fils de la Nuit,
Et les blanches Charites.

Et tu me dis : Leurs fronts sont semblables au tien,
Ne t’éloigne pas d’elles.
Sois Déesse ! et reçois pour guide et pour soutien
Ces trois divins modèles.

La forme est ton empire, et tu conserveras
La ligne humble et féconde,
Et tu tordras sans cesse, en élevant les bras,
Tes cheveux sur le monde !