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le sang de la coupe

Là, parmi les parfums qui ruisselaient en ondes,
Magdeleine, ravie et pleine de ferveur,
Dénouait ses cheveux, et de leurs nappes blondes
Elle essuyait les pieds de son divin Sauveur.

Ailleurs, sous le berceau d’une treille fleurie,
Où se mêlaient la vigne et le pampre vermeil,
L’enfant Jésus, porté par la Vierge Marie,
Souriait aux raisins inondés de soleil.

Puis, de tendres couleurs toutes enluminées,
Parmi les fonds d’argent par le rose adoucis,
Les légendes des saints dans les lettres ornées
Déroulaient tout au long de merveilleux récits.

Mais le peintre surtout, dans de riches losanges
Encadrés de rubis par son art précieux,
Avait représenté les extases des Anges
Transportés et ravis dans les sphères des cieux.

Les uns, dans le lapis couvert de sombres voiles
De leurs profonds regards teignant l’horizon bleu,
Conduisaient en rêvant des chariots d’étoiles
Et des astres épars aux crinières de feu.

Les autres, murmurant d’harmonieux distiques
Nés de l’embrassement de deux rhythmes charmés,
Tressaient les lys sans tache et les roses mystiques,
Pour ceindre de parfums leurs cheveux enflammés.